Une usine à musique

J'ai eu la chance pendant mes vacances de pouvoir visiter l'usine Gibson, la célèbre marque de guitare, à Memphis, Tennessee. Petit retour et petit récit de la visite... Arrivée, réservation obligatoire pour avoir une place. On patiente dans "le magasin de souvenir", où sont rassemblé à peu de chose près tous les modèles produits par Gibson et Epiphone, que l'on peut évidemment essayer sur demande... un petit paradis ! Après une demi heure, la guide nous rassemble, nous sommes une petite vingtaine, et l'on penêtre dans un couloir où sont accroché différents modèles de Gibson. Un petit historique de la marque, et on passe la double porte de l'usine, lunettes de sécurité sur le nez : un énorme hangar, bruyant et humide... On passe à coté des planches et des morceaux qui serviront aux manches, dans une salle à 90% d'humidité où ils sont entreposés pour ramollir... La visite commence, on suit un chemin entre deux lignes de ruban adhésif fluo, slalomant entre les machines et les ouvriers. En 1h, je vais voir comment transformer quelques planches de bois en un instrument de luxe...

Malheureusement, il était bien évidemment impossible de prendre des photos à l'intérieur de l'usine, mais vous devriez trouver un diaporama avec plusieurs image en cliquant ici, pour illustrer mes propos, ainsi qu'une série de vidéo en fin d'article.

L'usine de Memphis est la plus récente ouvert par Gibson, et elle est chargée de la fabrication des guitares électriques dites "hollowbody", c'est à dire avec une caisse de résonance, comme ci contre. Les autres modèles (comme les fameuses Les Paul) sont fabriqués dans l'usine de Nashville. L'usine emploit environ 75 employés, pour une production moyenne de 45 guitares par jours, sachant qu'il faut plus ou moins trois semaines pour fabriquer une seule guitare. La majeure partie du travail s'effectue à la main, il n'y qu'un seul ordinateur sur le processus d'assemblage ! Le taux d'humidité à l'intérieur de l'usine est en outre assez élevé (45%), pour faciliter le travail du bois et éviter que des poussières flottent et gênent la respiration des ouvriers : alourdies par l'eau, les poussières de bois tombent au sol.

Les planches de bois sont d'abords découpées, puis pressées dans des machines entre quelques heures à quelques jours selon si elles serviront à faire la table (le dessus de la guitare), des cotés et du dos de l'instrument. Cette pression leur donne la forme d'une partie du corps de la guitare, et permet une certaine solidité et rigidité du bois. Une machine contrôlée par ordinateur découpe ensuite dans la table les trous pour les micros, le chevalet ainsi que les ouïes. La guitare est assemblée et maintenue par un binding de plastique : sur la photo dessus, on remarque les bords plus clairs sur la table : c'est le binding. Elle est pendue un moment, entouré d'élastique, afin d'assurer une bonne cohésion entre les différent morceaux et renforcer le binding

Le manche quand à lui est sculpté, et s'emboite dans le corps de la guitare à la manière d'une pièce de puzzle : c'est ce qu'on appelle un manche collé, qui donne beaucoup plus de sustain (= une plus grand durée à une note) à l'instrument qu'un manche vissé. Les frettes (les petits morceaux de métal sur le manche) sont toutes collées à la main : un mauvais placement rendrait l'instrument faux et injouable. Les motifs en nacre sont collés dans les emplacements creusés au préalable. 

Ceci fait, la guitare est peinte au pistolet à peinture, sans qu'aucun dessin préalable n'ait été réalisé dessus : en d'autres termes pas de lignes pour ne pas dépasser, tout se fait à l'oeil ! J'ai même pu voir un prototype de finition encore non commercialisé... Si vous voyez une Gibson semi-Hollow finition requin, pensez à moi !

Puis, après séchage, on applique plusieurs couches de vernis nitro-cellulosique qui protègent la peinture et le bois, toujours au pistolet. Ensuite, une poignée d'employé est payée pour corriger les erreurs de peinture (s'il y a de la peinture à un endroit où il ne devrait pas y en avoir) à l'aide de lame de rasoir : il s'agit de gratter la peinture indésirable avec précaution pour ne pas abîmer le reste de la finition. Enfin, la guitare est polie à l'aide de grosses brosses tournantes, afin d'effacer toutes les petites bosses du vernis : tant que la finition n'est pas parfaite, la guitare reste bloquée à cette étape.

Dernière étape du montage, et mon job de rêve, l'électronique : après avoir monté les différentes pièces et câbles de la guitare, les ouvriers à ce poste ont obligation de tester la guitare, aussi fort et aussi longtemps qu'ils le veulent, ils sont les premiers à faire sonner l'instrument : c'est le dernière contrôle de qualité avant l'emballage. Si c'est pas le rêve ? A savoir, si la guitare ne répond pas aux standards de qualité et qu'elle n'est pas réparable... elle est détruite ! Le prix des guitares qui sortent de cette usine ? Entre 3000 et 6000 dollars...